Défenseure des droits humains
Il y a un avant et un
après ce jour-là. Le 29 novembre 1997, le frère de Houria Es-Slami, qui vient
de soutenir sa thèse de médecine, lui rend visite. Il s’absente de
l’appartement pour passer un coup de téléphone. Il ne reviendra jamais.
« C’est une blessure dont on ne guérit pas », confie Houria Es-Slami,
première femme élue présidente, en 2015, du groupe de travail des Nations unies
sur les disparitions forcées ou involontaires qui existe depuis trente-cinq ans. L’ampleur
du traumatisme, la défenseure des droits humains n’en laisse rien
paraître : « Il faut apprendre à contrôler ses émotions. C’est un
travail sur soi. J’ai choisi le dialogue et non la confrontation. Une réaction
hâtive est destructrice ». Née à Oujda, elle grandit au sein d’une fratrie
de huit enfants. Passionnée par les langues, elle s’inscrit à l’École
supérieure roi Fahd de traduction de Tanger. Lauréate, elle est aussitôt
recrutée par le département de traduction du secrétariat général du gouvernement.
Elle y restera sept ans avant de changer pour un autre poste à responsabilités
au sein de l’Isesco, l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et
la culture. En 2007, elle intègre la Caisse de dépôt et de gestion en tant
qu’office manager. Parallèlement à sa carrière, Houria Es-Slami travaille
sans relâche pour établir la vérité sur les disparitions forcées et contrer
l’oubli. Depuis 2011, elle est membre du Conseil national des droits
de l’Homme au Maroc et présidente du groupe de travail chargé du développement
des relations internationales, des partenariats
et de la coopération s’y rattachant. Elle a été présidente du Forum des
alternatives Maroc, directrice exécutive de la Fondation Driss-Benzekri pour
les droits humains et la démocratie. Elle est également membre fondatrice du
Forum marocain pour la vérité et la justice. À travers les rapports qu’elle
rédige, Houria Es-Slami porte la voix de plusieurs familles du monde qui lui
confient leurs histoires afin que soient transmises leurs doléances :
« J’aime la dimension humaine de notre mission à l’ONU qui vise à obtenir
des résultats et à apaiser des familles entières. Je connais l’impact d’une
disparation sur la vie des proches... », explique-t-elle avec beaucoup de
pudeur.